Every BD

Le méridien des brumes 2

Un trio incroyables mène l’enquête depuis les rues d’un Londres fantastique (« steam punk » pour être exact) jusqu’à un temple secret d’Afrique. Après avoir mit un point final aux meurtres de l’équarisseur, les personnages découvrent qu’il était au service de quelqu’un d’autre. De plus, des intrigues occultes se nouent dans les coulisses du royaume de la reine, dans le but de s’emparer d’un prodigieux trésor.

Dès les premières pages, et même sans avoir lu le tome 1 (!), cet étrange univers victorien, peuplé de machines à vapeur et de dirigeables, est un régal pour le lecteur. Le dessin est fouillé, original sans être excentrique. L’ensemble offre un monde imaginaire d’une rare richesse. On oubliera l’horrible dessin de la planche 15 (la case tout en haut à droite) où un personnage qui donne un coup de pied semble ne pas avoir de bassin… Et l’on ne retiendra que les décors urbains intrigants, les paysages africains grandioses et une galerie de personnages tous très bien faits. N'oublions pas la couverture qui est magnifique. D’ailleurs, on aime tellement cet univers graphique, que pour une fois il y aura deux extraits de planches !

L’intrigue avance a un rythme soutenu, les personnages sont biens marqués et intéressants, mais l’histoire est peut-être un peu complexe parfois. Elle est laborieuse à suivre si l’on n’a pas lu le premier tome. Un mal pas trop gênant, puisqu’il suffit de se plonger dans le premier album pour y remédier.

M. F.

Le méridien des brumes 2 ; Parras et Juszezak ; éditions Dargaud.

Jazz Club

Pour une fois, avant la BD, commençons par parler de la collection à laquelle elle appartient. Les éditions Dargaud regroupe au sein de sa collection « Long Courrier », une superbe série de bandes dessinées. On ne les a pas toutes lues, mais à chaque fois, celles qui nous sont passées entre les mains ont fait mouche. Le long voyage de Léna, Les cinq conteurs de Bagdad, Où le regarde ne porte pas (primé à Angoulême), chacun de ces récits est une petite merveille.

Jazz Club est du même calibre. Le dessin est unique, à la fois surréaliste, drôle et poignant ; l’histoire est forte, originale et intrigante ; le scénario est intelligent… Evidemment cette suite de qualificatifs ne vous apprend pas grand-chose sur la bédé elle-même. De quoi ça parle ? Comment ça commence ? Ah… C’est que ce serait pécher que d’égratigner le mystère. Eh bien c’est l’histoire d’un musicien de jazz qui a des problèmes. Vous n’en saurez pas plus. A moins de lire la BD, un plaisir dont il serait dommage de se priver.

M. F.

Jazz Club ; de Clérisse ; aux éditions Dargaud.

Victor Lalouz 2

Victor est petit et con, il a des grosses lunettes, une calvitie précoce, et surtout, il est super lourd. Il travaille dans une station de radio où il anime une émission de libre antenne. Sinon, le reste du temps, il se prend râteau sur râteau avec les femmes, il est ridiculisé par les hommes, et il parle de sa mère à un psychiatre.

L’album se découpe en petit sketchs d’une demi-page. Chaque séquence est une véritable claque dans la tronche pour Victor, et les claques, c’est marrant. En plus, le dessin est original, et il y a un petit monde qui se développe au fil des pages : le psy, la radio et ses animateurs, hôtesses, dirigeants…

L’album est donc plutôt bon. Il ravira les amateurs d’humour bien lourd et de gros gags. Pour les autres, voici un petit conseil de lecture : n’avalez pas la BD d’une traite. Pour rire quand même, tout en évitant l’overdose, ne dépassez pas une douzaine de sketchs toutes les six heures, en dehors des repas. Respectez les doses prescrites. En cas de nausée parlez en au choix : à votre pharmacien, à votre libraire, ou sur dans les commentaires de cette note.

M. F.

Victor Lalouz 2 ; de Aranega ; aux éditions Dargaud.

Le chat du rabbin 5

Dans la famille des BD qui ne ressemblent à aucune autre, je demande le chat du rabbin.

L’histoire est étrange : des rabbins trouvent un juif russe caché dans une caisse de livre et décident de l’aider à trouver la Jérusalem de l’Afrique noire.

Le scénario est étrange et difficilement résumable. Sachez qu’on y croise Tintin. (Oui, le maître de Milou)

Les personnages sont plus qu’étranges : un chat qui parle, un vieux rabbin, un musicien musulman itinérant, un chrétien alcoolique, bagarreur et débauché…

Le dessin est lui aussi, vous l’avez deviné, très étrange : absolument pas réaliste, avec beaucoup de traits et de griffonnages, des cases irrégulières, parfois de annotations…

Avec tout cela on obtient logiquement une BD bizarre, originale et captivante. Une véritable œuvre d’auteur qui se lit comme un bon roman.

M. F.

Le chat du rabbin 5 ; de Sfar ; eux éditions Dargaud

Djinn 6

Kim Nelson se rend en Afrique, à la recherche d’une perle noire qui lui donnera accès au trésor du sultan. Elle se plonge dans les vestiges d’une légende, celle de la déesse Anaktu, une divinité dont elle serait la descendante. L’argent du maharadja lui permet de monter une expédition, mais dans l’ombre, d’étranges personnages sont prêts à tout pour l’en empêcher.

Au fils des pages de ce sixième tome, les auteurs construisent une ambiance lourde et pesante qui vient lier avec justesse tous les éléments du récit : la chaleur de l’Afrique, la menace d’un complot, les secret occultes et mystiques, le désir et la sensualité de la djinn.

La belle Kim est fascinante Dans une scène, elle doit passer une épreuve : marcher nue sur un tapis de braises. Bien que cette scène n’occupe qu’une planche ou deux, c’est cette atmosphère que l’on retrouve tout long de l’histoire. Le mystère et la sensualité.

Seul petit reproche : si vous aimez l’action, les récits que se déroulent à toute allure, les retournement de situation, les surprises et les révélations brutales, cet album n’ira peut-être pas assez vite pour vous. Il y a plusieurs scènes très fortes (comme celle où un vieil Africain couvert de sang tend son cœur à Kim), mais globalement le rythme est lent et le mystère reste entier. Ce tempo n’est pas du tout une faiblesse et la BD est excellente. A vous de choisir si vous vous laissez entraîner…

M. F.

Djinn tome 6 ; de Dufaux et Miralles ; aux éditions Dargaud.

Scorpion 7

Rome au XVIIIe siècle. Trebaldi est le nouveau Pape, élu suite à une conspiration, il étend son pouvoir grâce au meurtre, à la terreur et à ses fidèles moines-soldats. Le Scorpion est le seul à pourvoir l’arrêter. Pour cela, il doit plonger dans son passé, à la recherche de ses origines.

Avec cet album, c’est un nouveau cycle des aventures du Scorpion qui commence. Dans un univers déjà riche de sept volumes, des nouveaux éléments se mettent en place : de nouvelles relations entre les personnages se tissent, des secrets sur le point d’être révélés, des complots se mettent en place…

Le dessin est superbe et l’histoire est servie par un découpage dynamique. Les scènes d’action s’enchaînent avec les phases d’enquêtes et des moments plus légers. Au niveau de la narration, des petits flash-back et de brefs rêves viennent apporter une dimension supplémentaire, sans alourdir le récit. Le texte est efficace et on excusera volontiers les petites répliques de combats comme : « – Meurs, misérable ! – Après toi ! – Argh ! » On dirait du mauvais James Bond ou du bon X-Or, mais ça fonctionne tout de même.

Le volume 7 des aventures du Scorpion n’évite pas quelques-uns des clichés du genre, mais il les noie dans un ensemble de grande qualité.

M. F.

Le Scorpion 7 ; de Desberg et Marini ; aux éditions Dargaud.

La danseuse du temps 2

Une jeune fille retourne dans un jardin secret, un endroit mystérieux sur une petite île entre la Corée et le Japon. Là, elle retrouve une shaman, une danseuse magique qui peut voyager dans le temps et l’espace, mais qui doit voler la vie des hommes pour survivre.

Le récit plonge dans les légendes coréennes pour y puiser des éléments fascinants : une danse magique, une concubine royale bannie, des créatures qui volent la vie, un antique sanctuaire secret… Ces morceaux de mythologie sont transformés en un fantastique moderne et captivant. Par exemple, les danseuses se mêlent à nous, organisent des spectacles et enseignent leur art…

Le fond de cette histoire repose sur des bases solides… et heureusement ! Car la forme est plutôt fragile. Le récit est assez plat et sans rebondissement, les dialogues sonnent faux, les personnages assez minces.

Quand au dessin, il laisse une impression étrange. Franchement agaçant au début, il semble brouillon et peu maîtrisé. Puis, au fil des planches, il parait s’améliorer pour finalement nous offrir de superbes scènes de danse où les corps prennent des postures dynamiques et les personnages quittent le sol. Des moments qui sont malheureusement trop rares dans cette BD.

M. F.

Les danseuses du temps ; de Illona, Jee-Yun et Jung ; aux éditions Dargaud.

Les cinq conteurs de Bagdad

Amateurs d’histoires, vous allez être servis. Dans cette albums, les cinq plus grands conteurs de Bagdad se lance dans une quête : trouver les plus belles histoires du monde afin de remporter le concours organisé par le Calife.

L’idée fait pensé à un joli conte de fées, séduisant mais pas forcément palpitant. Ca n’est absolument pas le cas. Les cinq conteurs de Bagdad est un récit riche et complexe, avec un vraie belle histoire, des personnages réussis, un scénario habile (très habile même), du contenu et de la profondeur. Le tout est porté par de l’action, du voyage, de l’humour, des dialogues impeccables et un dessin au trait fort et à l’énergie surréaliste.

Il y a des BD sur lesquelles on a envie d’écrire et d’autres où cela semble inutile. Il suffit de les lire. Celle-là en fait partie.

M. F.

Les cinq conteurs de Bagdad ; de Vehlmann et Duchazeau ; éditions Dargaud.

Supermurgeman

Supermurgeman, c’est le super héros qui tire ses pouvoirs d’une bière spéciale : la supermurgebière. Il possède un frigo spécial, qui est miraculeusement plein de canettes à chaque fois qu’on l’ouvre. Jusqu’au jour où les supers canettes disparaissent. Comment faire régner la justice sur son île sans ses supers pouvoirs ?

Supermurgeman, c’est un univers loufoque et riche : sa femme le trompe sans répit, les elfes de la forêt vendent des machins à collectionner, les mousquetaires de la distributions ravitaillent les épiciers, le shérif joue au petit train, et on y croise même Henri Cerveau, l’homme le plus intelligent du monde (si, si.)

Le scénario est une jolie petite mécanique, d’ailleurs, le professeur Tannenbaum l’explique au lecteur dans les premières pages. Ca n’a l’air de rien, on navigue en pleine folie, on rit beaucoup, mais tout est prévu. Les histoires se coupent, les personnages se croisent, les chapitres s’éclairent, et c’est un vrai bonheur.

M. F.

Supermurgeman tome 3 : la fuite des cerveaux ; de Mathieu Sapin ; éditions Dargaud.

Le long voyage de Léna

Une femme, brune, magnifique, se rend seule à Berlin Est. Elle rencontre un vieux fonctionnaire, un retraité qui coule des jours paisibles dans une petite maison près d’un lac. Il lui remet une enveloppe que Léna apprend par cœur avant de la détruire. Commence alors un long voyage direction le sud, à travers l’Europe Orientale. A chaque étape elle rencontre de mystérieux interlocuteurs et leur remet un petit paquet. Au fil du chemin de la belle Léna, page après page, on sent les fils d’un complot se nouer. On perçoit aussi la noirceur d’un passé qu’elle veut oublier.

Le long voyage de Léna… Le titre annonce la rythme ! Le récit est long et lent, comme le voyage. Mais ce qui aurait pu être une faiblesse, une brèche pour l’ennui ou l’endormissement, se révèle être un vrai plaisir. Délicieux et riche.

Riche, car cette BD contient une foule de petits choses qui s’additionnent pour former un tout très réussi. Il y a ce complot qui prend forme, ce stratagème mystérieux, ces mille précautions et ces ruses d’espion. Il y a cette femme sensuelle et pourtant si sombre, si triste parfois. Il y a son passé qui la suit et qui lui pèse. Il y a aussi ces paysages magnifiques et variés, très précis et documentés, qui font que le lecteur voyage aussi. Un beau voyage...

M. F.

Le long voyage de Léna ; scénario de Christin et dessin de Juillard ; édition Dargaud.